4.1. L’habilitation entre époux

Les informations ci-après figurent sous la forme d’un tableau dans la version pdf de la présente fiche.

  • Demandeur : Epoux ou épouse
  • Personne(s) pouvant être désignée(s) : Epoux ou épouse
  • Destinataire : Juge des tutelles
  • Condition(s) à vérifier : Epoux se trouvant hors d’état de manifester sa volonté
  • Contenu de la demande
    • Requête au juge des tutelles
    • Certificat médical
    • Pièces justificatives
    • Copie de l’acte de mariage
    • Projet d’acte, inventaire du patrimoine, actes de propriété…

L’habilitation entre époux. En résumé…

Ce dispositif de représentation est issu de la loi n° 65-570 du 13 juillet 1965, portant réforme des régimes matrimoniaux. Cette mesure a été créée pour répondre aux difficultés juridiques que peut rencontrer une personne mariée lorsque son conjoint est notamment atteint de troubles qui ont pour effet de le rendre hors d'état de manifester sa volonté. Tel est par exemple le cas lorsque l'époux dispose d'un compte bancaire ouvert en son seul nom ou lorsque son conjoint souhaite vendre un bien commun, ou un bien propre qui constitue le logement familial. L’établissement d’une procuration présentée à l’établissement bancaire n’est alors pas envisageable compte tenu que le conjoint est hors d’état de manifester sa volonté.

Considérer l’habilitation entre époux, si la mesure est adaptée, en priorité au regard des mesures d’habilitation familiale, de sauvegarde de justice, de curatelle et de tutelle. Cette priorité est énoncée aux articles 428 et 494-2 du code civil.

Au sujet de la hiérarchie des mesures de protection, nous renvoyons à l’introduction de la quatrième partie du présent guide.

I. Les modalités d’ouverture d’une mesure d’habilitation entre époux

A. Conditions à vérifier

Dans le cas d’une personne atteinte de troubles psychiques, l’époux visé par la mesure doit « se trouver hors d’état de manifester sa volonté » (articles 217 et 219 du code civil). L’habilitation, dans le cadre du régime de la communauté, fait référence à une impossibilité de manifester sa volonté « de façon durable » (articles 1426 et 1429 du même code).

L’habilitation entre époux peut être demandée pour d’autres motifs que les troubles du discernement du conjoint. Il peut s’agir, par exemple de l’inaptitude ou la fraude du conjoint.

B. Formulation de la demande d’habilitation

  1. Auteur possible de la demande

La demande doit être formulée par le conjoint, c’est-à-dire la personne qui est mariée à la personne âgée ou en situation de handicap (articles 217, 219, 1426 et 1429 du code civil).

  1. Contenu de la requête

Forme de la requête auprès du juge des tutelles. Le requérant doit compléter le formulaire CERFA n° 15734*03, intitulé « Demande d'habilitation judiciaire aux fins de représentation du conjoint - Requête au juge des tutelles ». Des indications pour compléter celui-ci figurent dans la notice qui y est jointe.

Eléments accompagnant la requête. « La requête de l'époux est accompagnée de tous éléments de nature à établir l'impossibilité pour son conjoint de manifester sa volonté ou d'un certificat médical, si l'impossibilité est d'ordre médical » (article 1289-1 du code de procédure civile).

Il est donc nécessaire de faire établir un certificat médical, par exemple par le médecin traitant, certifiant que le conjoint n’est pas état de procéder lui-même à l’acte ou aux actes envisagés. Il n’est pas requis que le certificat médical soit rédigé par un médecin figurant sur la liste établie par le procureur de la République.

  1. Juge compétent

Compétence du juge des tutelles dans le cas où la personne est dans l’incapacité d’exprimer sa volonté. « Les demandes d'autorisation et d'habilitation prévues par les articles 217 et 219 du [code civil], lorsque le conjoint est hors d'état de manifester sa volonté, sont présentées au juge des tutelles » (article 1286 alinéa 2 du code de procédure civile).

Juge des tutelles compétent : celui de la résidence habituelle de la personne. « Le juge des tutelles territorialement compétent est celui de la résidence habituelle de la personne à protéger ou protégée […] » (article 1211 du code de procédure civile, modifié par le décret n° 2008-1276 du 5 décembre 2008). « Le critère du lieu où demeure la personne est remplacé par celui de la résidence habituelle. Ce nouveau critère est la conséquence de la Convention de La Haye du 13 janvier 2000 » (circulaire DACS du 9 février 2009).

Instruction de la demande. « Le juge peut, soit d'office, soit à la demande des parties, ordonner toute mesure d'instruction » (article 1289-1 du code de procédure civile).

Audition. « A l'audience, il entend le conjoint. Il peut toutefois, sur avis médical, décider qu'il n'y a pas lieu de procéder à cette audition » (article 1289-1 du code de procédure civile).

  1. Décision du juge des tutelles

Notification de la décision judiciaire. Elle est notifiée aux deux conjoints et aux personnes qui peuvent être directement affectées par cette décision.

Appel de la décision du juge des tutelles. Un recours est possible dans les quinze jours de cette notification (article 1239 du code de procédure civile). Le concours d’un avocat n’est pas obligatoire.

II. Les effets d’une mesure d’habilitation entre époux

  1. L’autorisation

Fondée sur l’article 217 du code civil, elle concerne toujours des actes qui auraient nécessité l’accord des deux conjoints. Elle ne peut donc s’appliquer aux situations dans lesquelles le conjoint, hors d’état de manifester sa volonté, devrait normalement signer l’acte seul (par exemple, la vente d’un bien propre). Dans ce dernier cas, seule l’habilitation, fondée sur l’article 219 du code civil, permet l’accomplissement de l’acte par le conjoint.

  1. L’habilitation

Fondée sur l’article 219 du code civil, elle permet de représenter son conjoint même pour des actes que celui-ci, normalement, était seul en mesure d’effectuer (par exemple, la vente d’un bien qui lui appartenait en propre). L’habilitation peut être demandée pour effectuer un acte en particulier, ou peut être sollicitée de manière plus générale, pour effectuer au nom du conjoint tous les actes nécessaires à la vie familiale lorsque ce dernier est dans l’incapacité à long terme de manifester sa volonté.

L’habilitation entre époux ne permet de remplacer son époux que pour les actes patrimoniaux, et non pour les actes strictement personnels.

Représentation pour ce qui est de l’administration des biens sous le régime de la communauté. La représentation est régie par les articles 1426 et 1429 du code civil.

  1. Dans le cas où le juge des tutelles n’a pas autorisé l’habilitation

« A défaut de pouvoir légal, de mandat ou d'habilitation par justice, les actes faits par un époux en représentation de l'autre ont effet, à l'égard de celui-ci, suivant les règles de la gestion d'affaires » (article 219 du code civil).

La gestion d’affaires est définie de la façon suivante : « celui qui, sans y être tenu, gère sciemment et utilement l'affaire d'autrui, à l'insu ou sans opposition du maître de cette affaire » (article 1301 du code civil). Pour plus de précisions, voir la fiche n°4.3 relative à la sauvegarde justice.

III. La publicité de la mesure d’habilitation entre époux

Il est fait mention de l’habilitation de l’époux pour gérer la communauté ou les biens propres du conjoint en marge de l’acte de mariage ainsi que sur la minute du contrat de mariage (article 1445 du code civil, auquel les articles 1426 et 1429 du même code renvoient).

La demande et le jugement sont publiés conformément aux règles du code de procédure civile.